jeudi 30 septembre 2021

Parlons peu, parlons vins...

 C'est la saison des vendanges, des foires aux vins dans les grandes surfaces... et sur les tables de vos librairies fleurissent aussi les ouvrages sur le sujet ! Je vous parle de mes favoris du moment, pour vous aider à y repérer. Certes, il y a les classiques guide Hachette des vins et autres Larousse... Mais des ouvrages plus originaux existent, qui feront de belles idées cadeaux, pour un anniversaire, ou déjà pour préparer Noël ! 

La carte des vins, s'il vous plaît

J'aime beaucoup cette collection autour du vin, et des autres alcools, très graphique et visuellement très claire et didactique. Chaque double-page présente un vin, ou un alcool dans le second opus, Le tour du monde en 80 verres. Les deux autres, La carte des vins et La route des vins se concentrent uniquement sur les vins. Le premier nous propose des vins du monde entier, mais le second, qui est aussi le dernier paru, reste centré sur la France. Dans chaque région viticole, les différents cépages nous sont présentés, avec des détails sur la formation des sols et ce qu'ils impliquent pour les vins qui en viennent, l'histoire des plus grands crus, et bien sûr, des infographies colorées pour visualiser toutes ces informations. Quant au dernier livre, Le tour du monde en 80 verres, comme son nom l'indique, s'attache à nous présenter différents alcools issus des cinq continents. Là encore, nous sommes informés de leur histoire, les coutumes qui y sont associées, mais aussi des idées de cocktails, des conseils de dégustation. Ces trois ouvrages forment une belle collection, et offrent de belles idées cadeaux. Seul reproche à faire, notamment au dernier titre évoqué : une sélection très européanocentrée... Sur 80 verres, la moitié sont européens... les 40 autres se répartissent donc entre américains (Nord et Sud sont distingués), africains, asiatiques et océaniens. On imagine donc le peu de breuvages pour certains continents défavorisés. 



Manifeste pour un vin inclusif

C'est là qu'on en vient au propos d'une autrice vigneronne : Sandrine Goeyvaerts. Rendre le monde du vin plus inclusif : pourquoi, comment ? Le pourquoi, c'est assez facile d'y répondre, lorsqu'on est soi-même une femme qui boit du vin. Les discussions en salon du vin où on est ignorées, le restaurant où le vin commandé par Madame est proposé à Monsieur pour goûter... A cause d'un effet de tradition, on accorde moins de crédit aux femmes pour comprendre les termes techniques, et celles-ci, de leur propre aveu, se sentent exclues dans ce domaine si masculin. Si cela vaut pour les femmes, on peut aisément le transposer aux personnes racisées, aux LGBT, et autres minorités, visibles ou invisibles. Selon l'autrice, changer cet état de fait passerait en premier lieu par le langage. Il est vrai que les critiques gastronomiques et autres cavistes et négociants utilisent bien volontiers des termes très imagés et peu représentatifs. Entre les précisions sur la robe du vin, les jambes ou la cuisse, ces critiques qui parlent de vins "bien en chair"... Vous admettrez que cela véhicule une image plutôt sexiste de cet univers. On y pense moins, mais il est bon aussi de se méfier, lorsque l'on cherche à qualifier le goût du breuvage, de termes évoquant l'exotisme : car ce qui est exotique à nos yeux, l'est-il réellement aux yeux de personnes issues d'un autre continent ? Pourtant, ces personnes ne sont-elles pas tout autant capables que nous, français blancs, de savourer un bon vin ? 


Tout l'enjeu, selon l'autrice, est donc de réfléchir à un langage plus inclusif, moins fourni d'images qui ne parlent qu'à certains. Décrire les goûts que l'on ressent ne devrait pas nécessiter un vocabulaire sexiste ou raciste. Se baser sur des observations concrètes (odeur de fruits, goût d'épices, etc) ne peut-il pas suffire ? Sandrine Goeyvaerts invite également les femmes ou les personnes racisées souhaitant déguster des vins à se réunir en non-mixité, ou du moins en mixité choisie. En effet, on constate assez aisément que, lors de réunions de dégustation, des femmes, des personnes racisées ou encore handicapées, ont parfois du mal à s'exprimer face à certains messieurs qui semblent se parler entre initiés... alors qu'ils le sont parfois bien moins que ceux qu'ils excluent. Apprendre à déguster du vin sans s'entourer d'hommes cis blancs peut permettre de gagner en aisance dans ce domaine, et de se sentir ensuite davantage à sa place, fort.e.s des connaissances acquises. 

Un beau programme que nous propose ce court essai, une réflexion à mener pour que le vin se démocratise. Coup de cœur pour ce texte sur le vin qui ne consiste pas en une énième glorification d'un univers très fermé sur lui-même. Vous pouvez, et je ne peux que vous y encourager, comme d'habitude, vous procurer ce petit ouvrage en cliquant sur l'image ci-dessous. 



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