mardi 20 avril 2021

Un peu de poésie...

 Bon, le Printemps des Poètes, c'était le mois dernier, mais à cette occasion j'ai lu plusieurs recueils de poésie, et je n'ai toujours pas pris le temps de vous en parler ! Alors je me rattrape en compilant mes découvertes dans un article... 



Il vise le ciel et tire, Thomas Vinau

Commençons par le plus court. Thomas Vinau est un auteur autour duquel je tourne un peu, sans jamais m'y frotter réellement. J'avais lu Nos cheveux blanchiront avec nos yeux, que j'avais trouvé touchant mais qui ne m'avait pas laissé un souvenir impérissable. Plus récemment, il s'était fait davantage remarquer avec Le camp des autres, qui me faisait envie, mais je n'ai jamais pris le temps de m'y plonger. Je vois pourtant régulièrement passer ses mots sur les réseaux sociaux, où il sème des petits bouts de poésie. Alors j'ai pris ce petit texte dans mon sac, pour le week-end de Pâques, et je me suis laissée emporter par ces quelques pages. 

L'auteur a eu ici envie de nous parler de Miles Davis. Non qu'il soit spécialiste de cet artiste, ni même de la musique, comme il le rappelle. Je crois qu'il avait simplement envie de jouer autour de cette figure et de faire danser les mots sur sa musique. Le résultat est surprenant, plaisant à lire. Une courte parenthèse poétique dans nos quotidiens, ça ne se refuse jamais. Pour autant, je n'ai pas ressenti d'émotions particulières lors de cette lecture. C'était beau et agréable, mais pas incontournable à mes yeux pour autant... 

home body, rupi kaur

Lors du même week-end, j'avais aussi glissé dans mon sac le recueil de rupi kaur. Cela fait longtemps que ses poésies connaissent un succès mérité, qui m'attire, mais je n'avais pas franchi le pas de m'y plonger réellement. C'est chose faite avec ce recueil plein d'intelligence, qui parle du corps des femmes. Il y a le corps physique, qui aime, souffre, désire. Et le corps des femmes au sens métaphorique, la sororité, pour employer un terme très actuel. L'autrice parle d'une expérience vécue, déchirante, qui a bouleversé et faussé son rapport à son propre corps. Le travail de reconstruction a été long et difficile, et c'est ce sur quoi elle revient dans ces pages pleines de lumière. 

Certains passages, dans la première partie, sont difficiles à lire, font trembler. Et pourtant, de ces horreurs, elle a su tirer de la beauté. Ce qu'il reste à la fin de cette lecture, c'est beaucoup d'émotions mêlées, mais surtout une impression de force, de l'espoir. Le propos de l'autrice est certes très personnel, mais il parvient sans mal à atteindre une universalité salvatrice, et peut, ainsi, s'adresser à chacune d'entre nous, femmes. 

Je suis obligée de mettre un avertissement de contenu : il est question ici de pédo-criminalité. Cependant, je ne peux aussi que vous encourager à lire cette poésie qui vous insufflera une force incroyable. 




Décomposée, Clémentine Beauvais

Je termine cette petite revue par la lecture poétique qui m'a le plus bouleversée parmi ces trois. Clémentine Beauvais, je crois qu'on ne la présente plus. Autrice jeunesse exceptionnelle, drôle à souhait, caustique aussi, qui n'hésite pas à bousculer. Elle a composé ici une œuvre bien différente, destinée à un public adulte, mais tout aussi particulière. Elle part d'un célèbre poème de Baudelaire, Une charogne. Poème plein d'une beauté crue, repoussante, et pourtant touchante, qui en tous cas ne laisse pas indifférent. Il en va de même pour le texte de Clémentine Beauvais, qui donne voix à cette charogne, qui n'est autre qu'une femme en pleine agonie. Alors que le poète déambule avec sa muse, Jeanne Duval, la femme suppliciée s'adresse à cette autre femme, demeurée elle aussi dans l'ombre d'un homme, et raconte leur(s) histoire(s). 

Cette charogne, sous la plume de Clémentine Beauvais, aurait été, de son vivant, fille de joie, puis chirurgienne dans le secret des chambres de bonne, avorteuse, ou criminelle. Ce texte est à l'image du poème dont il s'inspire : à la fois violent et sublime, de cette beauté qui dérange parce que non conventionnelle. Ces pages sont terribles à lire, elles nous remuent au plus profond de notre féminité. Et pourtant, là encore, on célèbre la sororité. En mettant en lumière des femmes vaguement évoquées, mais laissées dans l'ombre, d'abord. Puis en portant haut la voix des victimes de viol, des femmes abusées et trompées dans leurs sentiments, des petites sœurs que l'on protège, de celles qui doivent cacher leurs blessures. C'est une violence sourde qui se cache sous ces mots, une fureur froide, une rumeur qui enfle jusqu'à devenir un cri de rage. Un texte à lire, absolument, d'une puissance incroyable. 


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