mardi 28 mars 2017

En suivant la mer, Marie-Magdeleine Lessana

Encore un livre que j'avais envie de lire depuis un moment. En effet, la promesse me tentait bien ! L'auteure a fait le tour des côtes françaises, et en parle dans ce récit, évoquant à la fois les lieux traversés et les personnes rencontrées. D'autant que ce livre est publié chez un éditeur que j'aime beaucoup : Paulsen. Et pourtant, grosse déception !

Au début, tout semble concorder avec ce qu'annonce le résumé. L'auteure commence son tour des plages par le Nord, accompagnée d'une amie photographe. On ouvre donc ce singulier récit de voyage sur de belles descriptions, des considérations pratiques, des égarements de la pensée... Et cela semble donc parti pour plaire, vraiment ! 

Jusqu'à ce que viennent les considérations idéologiques... En effet, très vite, l'auteure établit une discussion entre les villes côtières populaires, pleine de vie où tout se déroule à merveille, et où les tranches de vie des personnes rencontrées paraissent merveilleuses ; et les villes balnéaires bourgeoises, qui lui paraissent ternes et mortes, où les gens croisés lui paraissent fades et sans aucun intérêt. Elle ne prend donc même pas la peine de s'arrêter dans certains endroits, où pourtant, si on s'y attarde un peu, on s'apercevrait qu'il est bien facile et léger de réduire le monde à ce simple clivage entre populaire et bourgeois. D'autant que Marie-Magdeleine Lessana affirme clairement son appartenance, ou du moins sa proximité avec la classe populaire. Mais est-ce bien vrai ? En effet, quand on a les moyens de manger au restaurant et dormir à l'hôtel tous les soirs ou presque, en plein été (donc la période où les tarifs des restaurateurs et hôteliers sont les plus élevés), n'est-on pas un peu bourgeois ? Quand on a des amis qui ont des maisons qui sur une île bretonne, qui à Biarritz, ou à l'île de Ré, n'est-on pas un tant soit peu proche d'une classe bien plus bourgeoise que populaire ? Le privilège de s'acheter des vêtements Armor Lux sur un coup de tête, est-il réellement accessible à une classe populaire, qui - l'auteure le dit elle-même - n'a pas les moyens de s'embarrasser de dépenses inutiles ? Et surtout, quand on possède soi-même une résidence secondaire sur la presqu'île de Ghiens, je crois pouvoir dire qu'on est bourgeois. Pas forcément très riche, mais tout de même plus que la classe populaire. Bref, comme vous le comprenez certainement à travers mes propos, cette distinction, égrenée telle un chapelet tout au long du récit, m'a énervée. Je ne pense pas que de séparer ainsi la société, et plus encore les touristes, soit utile. 



Et cette manie de se détourner des lieux "bourgeois" donc, ne m'a pas davantage plu. Certes, il existe parmi les touristes plusieurs classes de personnes, dont certaines ont plus moyens que d'autres, et donc s'offrent plus de petits plaisirs que d'autres. Mais est-ce parce qu'on offre une bouée à ses enfants qu'on n'est pas capable d'apprécier des plaisirs simples ? Comme celui, par exemple, de se laisser réchauffer par le soleil, tandis qu'on observe lesdits enfants s'ébattre avec joie dans l'eau toute proche... Est-ce parce qu'on possède une maison à tel ou tel endroit qu'on ne saurait pas apprécier la marche le long des côtes ? Est-ce parce qu'on gagne plus d'argent que d'autres qu'on saurait s'amuser moins qu'eux ? 

Peut-être aussi ai-je été énervée parce que Marie-Magdeleine Lessana a porté un avis plutôt négatif sur l'Île de Ré, que j'aime à appeler "mon île". Après y avoir passé moins de 48h, elle expédie sa visite en décrétant que l'île est trop pleine de bourgeois et donc pas assez pleine de vie... Hum. Permettez-moi de douter. Est-ce vraiment en ayant fait deux allers-retours en voiture sur cette île aux multiples paysages, où presque tout le monde ne se déplace qu'à pied ou en vélo, qu'on peut tirer une leçon aussi hâtive ? Quoi qu'il en soit, c'est ce que je déplore dans ce récit : qu'il tire ainsi des leçons hâtives de lieux et de personnes qui mériteraient d'être jugés avec plus d'attention et de recul. 

Et si toutes ces considérations gâchées par une idéologie à laquelle je n'adhère pas ont gâché ma lecture, le style ne l'a en rien rattrapée. C'est plat, sauf aux endroits où l'auteure tente de faire des effets de style, qui se transforment en fait bien vite en envolées lyriques quasi ridicules. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire