mardi 31 août 2021

Sainte Marguerite-Marie et moi, Clémentine Beauvais

 Avant l'été, Clémentine Beauvais prenait quelque peu des pincettes pour annoncer la sortie prochaine d'un livre chez un petit éditeur religieux, et cherchait donc des chroniqueurs qui ne soient pas complètement fermés au milieu catholique. J'ai sauté sur l'occasion, d'abord parce que je suis catholique, donc évidemment, ça ne me dérange pas de parler religion ! Et puis, pour des raisons plus personnelles, le titre de ce roman me parlait beaucoup, et le roman a encore davantage résonné en moi que ce que je pensais. 

Sainte Marguerite-Marie et moi n'est en réalité pas vraiment un roman. On est entre l'hagiographie (la biographie de saint) (je sens que j'en ai perdu quelques uns là, mais restez, vous allez voir, ça vaut le détour !) et l'autofiction. Clémentine Beauvais sait depuis toujours qu'elle a une sainte dans ses ancêtres : Sainte Marguerite-Marie, qui a vécu au dix-septième siècle. C'est une information familiale qui amuse, mais qui dérange aussi, un peu, dans un milieu plutôt de gauche agnostique. Parce que dans ce milieu, côtoyer des cathos, c'est assez mal vu... Pourtant, au moment où Clémentine se lance dans ce projet d'écriture, elle est bien forcée de flouter la frontière entre "agnostique, féministe, de gauche" et "très catho". En effet, elle est enceinte, et son compagnon est "très catho", donc il faut arrêter de s'enfermer dans des cases, non ? C'est à peu près dans cette période de sa vie qu'une amie, qui est aussi éditrice dans la "très catho" maison des éditions de l'Emmanuel, lui lance le défi, en plaisantant (ou pas ?) d'écrire un livre sur son ancêtre, cette sainte qui dérange, même chez les cathos. Marguerite-Marie, j'ai découvert sa vie en lisant le livre. Enfant, Jésus se manifeste à elle très tôt, et lui fait jurer fidélité et chasteté. Mais ça ne s'arrête pas là, puisqu'au nom de ces vision, la jeune fille, bientôt religieuse, s'inflige des souffrances étrangement cruelles. Est-ce réellement Jésus qui lui impose cela, ou bien le diable ? Si elle souffre ainsi, cela signifie-t-il qu'il faut avoir tant souffert pour devenir saint ou sainte ? alors que pourtant, de nos jours, on dirait plutôt qu'elle se mutile, et qu'elle souffre donc de troubles psychiatriques... Tout cela dérange pas mal, même pour la "un peu" catho que je suis. Et Clémentine Beauvais détricote toutes ces interrogations avec brio, et armée de son humour ravageur et touchant. 

J'ai été touchée par ce roman à plusieurs égards. Tout d'abord, il fallait, un jour, que je me penche sur la vie de cette sainte. En effet, si ce titre me parlait tant, c'est parce que ma marraine de confirmation a tout récemment prononcé ses vœux, devenant donc "sœur Marguerite-Marie". Il fallait que je comprenne mieux ce choix. Ensuite, je me reconnais assez dans les doutes de l'autrice, mais à l'inverse d'elle. Je viens d'un milieu plutôt "très catho", et même si je m'en suis un peu détachée, je reste croyante et pratiquante, et ma foi fait partie intégrante de ma vie. Oui mais voilà, c'est pas toujours facile d'assumer ça quand on évolue dans la sphère littéraire. Dans mes études de lettres, dans mon métier de libraire, sur les réseaux sociaux, j'ai fini par évoluer dans un milieu plutôt proche de "agnostique, féministe, de gauche". Et pendant un temps (en fait, encore maintenant), je me suis demandée : est-ce qu'on peut appartenir au milieu littéraire, ET être catho ? est-ce qu'on peut avoir des opinions plutôt très féministes, ET croire en Dieu ? Bref, cette histoire de cases hermétiques, de clans ennemis dont parle Clémentine Beauvais, ça me parle beaucoup, aussi. J'ai décidé de faire ce cheminement, d'orienter ma vie de lectrice et de libraire à la lumière de mes idéaux chrétiens (oui, je préfère me dire chrétienne que catho en vrai, ainsi ça inclut mes amis protestants, mais bref, autre débat). Eh bien quel plaisir c'est de voir une autrice dont je me sens proche pour ses idées féministes, son humour caustique, faire un pas vers le monde des chrétiens ! Bien sûr, ce livre ne fait pour Clémentine acte de conversion, mais elle montre que ces deux mondes peuvent coexister, sans mal, avec bienveillance, et amour même ! 

Alors voilà ce que je vous propose : à votre tour, armez-vous de bienveillance et d'amour pour aller ouvrir ce livre, certainement un des plus surprenants de la rentrée littéraire. Vous qui êtes chrétiens et curieux, voilà une merveilleuse occasion de découvrir cette autrice talentueuse. Vous, aussi, qui adorez Clémentine Beauvais mais regardez d'un œil soupçonneux cette parution, soyez rassurés : le pire qui vous arrivera dans ce livre, sera de découvrir que les chrétiens ne sont pas toujours des êtres barbants et ronflants, comme certaines messes auxquelles on peut assister (bon, soyons honnête, vous risquez aussi quelques grimaces de dégoût... mais aussi beaucoup de rire !). Bref, ce livre est une sorte de passerelle entre deux mondes, alors il ne peut que toucher un public large ! C'est donc le moment de courir l'acheter, ou de cliquer sur l'image ci-dessous pour vous le procurer ! 



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